
Recenser les femmes dans le froid n’est pas mince affaire et Ina Colombo ne peut que le confirmer. Cette enquête n’est pas son coup d’essai et « Women in Cooling : a Worldwide Survey » s’ajoute à une collecte de données menée depuis déjà plusieurs années par la Directrice générale adjointe de l’IIF, aussi secrétaire du groupe de travail CaRe « Career in refrigeration », présidé par Catarina Marques qui travaille à l’Université London South Bank au Royaume-Uni. Ce rapport de huit pages, publié en français en début d’année 2023, dresse le bilan de la place des femmes selon 810 réponses venues du monde entier, récoltées pendant près d’un an.
Lire l’étude en ligne : Femmes dans l’industrie de la réfrigération, de la climatisation et des pompes à chaleur, présentée lors de la sixième conférence internationale de l’IIF sur le développement durable et la chaîne du froid en août 2020. Une enquête rédigée par Ina Colombo, Catarina Marques, Miriam Rodway, Judith Evans, Graeme Maidment, Andrea Voigt, Fred-Arne Moundjmini Mombo.
L’ensemble des études de l’IIF est à retrouver, en ligne : https://iifiir.org/fr
Alors que la plupart des répondantes sont titulaires d’un diplôme d’études supérieures, le pourcentage de femmes déclarant travailler à des postes de terrain n’est que de 8 %. Pour Ina Colombo, cette présence est encore « trop faible ». Sur l’ensemble, 47 % ont travaillé ou travaillent depuis plus de 10 ans dans la profession. Cependant, seule une femme sur cinq avait été promue deux fois au cours des dix dernières années, tandis que 24 % n’avaient jamais eu de promotion, « ce qui suggère que les possibilités de progression de carrière sont limitées », note l’étude. Interrogées sur la perception de leur salaire, 55,4 % des répondantes ont estimé être payées équitablement par rapport à leur travail. Par rapport à leurs homologues masculins occupant des postes similaires, très peu (10 %) se sentaient fortement sous-payés.
Basée sur une étude publiée en 2020, la part des femmes dans les métiers du froid augmenterait. Ina Colombo y avait comptabilisé le nombre d’adhérentes des associations nationales et se réjouit d’une augmentation de leur présence deux ans plus tard sur la base des retours des répondantes. Ainsi, l’Europe est passée de 19 % à 33 % de femmes dans le froid. Dans le reste du Monde, on comptabilise 11 % de femmes en Amérique du Nord, 12 % en Amérique Latine et dans les Caraïbes, 8 % en Afrique et au Moyen-Orient, et 4 % en Océanie.

« Certaines associations ou institutions nationales ont considérablement augmenté, voire doublé, le nombre d’inscriptions de leurs femmes membres, comme l’AIRAH (Australie), l’ISHRAE (Inde), la NKF (Norvège), la SAIRAC (Afrique du Sud), l’IOR (Royaume-Uni) ou encore l’ASHRAE (États-Unis), remarque Ina Colombo, citant la conclusion d’une étude d’avril 2020 [Voir encadré page 26, ndlr]. Plusieurs initiatives sont entreprises par ces associations nationales, notamment des campagnes dans les médias sociaux, le mentorat, la mise en réseau, la sensibilisation des écoles, les prix et les bourses d’études. On constate également une augmentation du nombre de modèles, c’est-à-dire de femmes ayant réussi professionnellement et occupant des postes de direction dans le secteur et les associations, ainsi que des articles dans la presse spécialisée pour promouvoir la diversité et l’intégration dans le secteur ».
Aux sociétés de s’adapter
De quelles problématiques professionnelles souffrent les femmes dans le froid ? L’enquête, en identifie cinq : le difficile équilibre entre vie personnelle et professionnelle, le manque d’évolutions, les préjudices genrés des clients, l’absence de femmes dans leur entreprise et l’offre limitée à la formation. Pour l’IIF, la solution à certaines de ces problématiques peut venir des sociétés qui emploient ces femmes en adaptant, par exemple, une politique de ressources humaines adaptée comme des horaires flexibles et du travail à distance.

Concernant les modèles, la moitié des répondantes à l’enquête estiment ne pas en avoir. Ainsi, l’autre moitié cite comme exemple une personne travaillant déjà dans le secteur. Ces dernières évoquent aussi une arrivée dans la profession grâce à une initiative individuelle à travers la lecture et la recherche et enfin l’école.
Limites et suites
Existe-t-il des limites dans une telle étude internationale ? Ina Colombo le concède, il y en a plusieurs. « Comment pouvons-nous appeler toutes ces femmes à se recenser ? S’interroge-t-elle. Il faudrait qu’une politique nationale soit mise en place pour le faire dans la profession avec une base de données nationale accessible au grand public ». Aussi, le caractère en ligne de cette enquête prive certaines répondantes, plus âgées ou n’ayant pas autant accès au numérique, de la possibilité de participer. Pour l’IIF, la suite des recherches et du mentoring à destination des femmes doit passer par des partenariats entre organismes. L’INWIC (Réseau international des femmes dans le froid, en anglais), compte œuvrer sur les deux prochaines années à travers huit thématiques de travail. ?
Les recommandations de l’enquête
Pour l’IIF, il est nécessaire de saisir les défis et les problèmes des femmes qui travaillent dans les services et les domaines professionnels du secteur RACHP (Réfrigération, air conditionné et pompes à chaleur). Les associations locales ou régionales peuvent mieux les atteindre par le biais d’enquêtes similaires dédiées, qui peuvent être conçues dans les langues locales si nécessaire.
Les sociétés et les entreprises sont encouragées à établir ou à mettre à jour leurs politiques sociales et de ressources humaines par les femmes du RACHP dans le cadre de cette enquête, tels que l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, les possibilités de formation et d’avancement professionnel ainsi que l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale.
Les femmes accordent une grande attention aux questions d’environnement et de durabilité, comme le montre l’enquête. Il est nécessaire de tirer parti de cet enthousiasme en plaçant les femmes du programme RACHP à l’avant-garde des activités de recherche et de développement.
Des campagnes ciblées devraient être organisées pour attirer les jeunes, y compris les femmes, à s’inscrire dans des disciplines d’enseignement et de formation professionnelle liées au RACHP, ainsi que pour ainsi que pour faciliter leur intégration dans la main-d’œuvre.
Encourager et promouvoir l’inscription et l’engagement auprès de l’INWIC qui offre des opportunités multiples pour les femmes dans le CVC, y compris, mais sans s’y limiter, le réseautage, le mentorat, les modèles de rôle et les stages.
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