Alors que le troisième frigoriste de l’histoire a être médaillé d’or « Un des meilleurs ouvriers de France », a été dévoilé fin 2022, la récente présence de la profession au sein de cette institution du savoir-faire interroge sur son intérêt pour le concours. Entretien avec Jean-Luc Chabanne, Secrétaire général chez Comité d’organisation des expositions du travail.

À quand remonte l’idée d’ouvrir le concours aux frigoristes ?

Ce qui nous amène à ouvrir le concours à un métier est souvent le souhait initial d’un syndicat professionnel. Ici, c’est le Snefcca qui nous a démarchés et que nous avions rencontré à l’époque puisque la demande s’inscrivait dans notre philosophie : celle de la valorisation des parcours et des métiers. Après cette demande nous avons demandé au syndicat de nous écrire un référentiel d’activités pour ensuite ouvrir le concours à des participants de 35 à 40 ans de moyenne d’âge, car cette tranche d’âge correspond généralement à une activité professionnelle et nous estimons que la situation de travail est formatrice. En nous concentrant sur ces âges, notre idée est de concevoir des « vigies » pour les jeunes.

« Il faut que le froid trouve la confiance à venir se frotter à ce niveau d’excellence »

Si vous prenez l’apprentissage, les WorldSkills et les MAF, on pourrait résumer cela par « les jeunes parlent aux jeunes », soit un processus qui alimente les centres de formation puisque nous avons besoin des jeunes qui demain seront des talents en exergue. Les MOF arrivent après cet apprentissage. Nous avons un âge d’entrée dans le concours de 23 ans qui correspond généralement à une présence effective dans la profession. Mais la grande masse de nos candidats se situe entre 25 et 55 ans, 90 % des effectifs sont là.

Qu’est-ce qui vous a intéressé dans la mise en avant du froid industriel ?

Nous sommes attachés à la situation réelle de travail. Ainsi un candidat de plus de 35 ans ne peut pas passer une épreuve avec des outils didactiques en classe. Alors ces derniers vont se présenter à nous avec des dossiers techniques d’une réalisation en cours, ce qui explique aussi le délai de deux à trois ans entre chaque promotion car le temps de constitution du dossier peut durer. Si la situation de travail présentée par le candidat correspond au cahier des charges défini par la profession, l’opération est lancée et les jurés se déplaceront sur site pour juger de la pertinence et la qualité du travail. Pour toutes ces raisons, le froid avait toute sa place dans notre aventure.

Pour le titre de la 27e promotion, le froid n’a connu que deux candidats dont l’un a abandonné en pleine compétition. Comment expliquer ce manque d’intérêt des frigoristes pour le concours ?

Il y a un problème de langage. Il ne s’agit pas d’un concours puisque cela impliquerait un podium ou un numerus clausus, ce qui n’est pas le cas. Nous sommes dans un examen, ainsi tous les candidats peuvent être titrés comme personne ne peut l’être puisque nous sommes à la recherche de l’excellence. En ce qui concerne le froid, nous pensons que les salariés et les chefs d’entreprise se censurent. Avec sûrement plus d’humilité que dans l’alimentation ou la cuisine (rires). Il y a dans le froid des centaines de talents, il faut que la profession trouve une certaine confiance à venir se frotter à ce niveau d’excellence ! Cette conquête vers les talents doit se faire avec les syndicats professionnels pour communiquer et faire savoir. En 2018, lors de l’ouverture des MOF à la réfrigération technique, nous avons été en contact avec des sociétés comme Dalkia et Vinci pour déclencher des ambitions. Aussi, les PME ne doivent pas être oubliées ! Certaines ne sont parfois même pas informées qu’une épreuve existe pour les frigoristes. Pour la prochaine session, nous réfléchissons à renforcer la communication avec la branche, les professionnels et les entreprises pour que tout le monde comprenne que révéler des talents peut être salvateur à toutes et tous.

Il a osé !

Damien Favreau, un frigoriste de 35 ans est devenu en cette fin d’année le troisième lauréat frigoriste du concours MOF et sera sacré en mai 2023. 

Une passion pour les savoir-faire

Jean-Luc Chabanne est arrivé au COET-MOF en janvier 2016 après un parcours dans le domaine de l’industrie et la métallurgie. « À 55 ans, j’étais dans la recherche d’une nouvelle expérience professionnelle qui donne du sens et de différent. Le COET ressemblait à mon parcours et la philosophie de mise en valeur des savoir-faire m’a plu. J’ai ainsi découvert des dizaines de métiers », explique-t-il.

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