
De profondes convictions au service de la profession
Demander à Claude Brian d’évoquer Jean Jacquin, c’est revivre du même coup les grands moments d’un long mandat dont notre interlocuteur a été l’un des témoins privilégiés. Ces deux personnalités du Froid n’ont en effet jamais cessé d’échanger leur vision sur une filière qu’ils ont largement contribué à faire évoluer.

F. Roffé
Claude Brian et Jean Jacquin n'ont jamais cessé d'échanger leur vision sur les évolutions de la filière.
En 2012, à l’occasion de la remise de la légion d’honneur à Jean Jacquin, Claude Brian saluait déjà le pragmatisme de l’ancien président du Snefcca : « Ce pragmatisme [qu’il l’a] conduit pendant tout ce temps consacré à l’action collective au service d’un métier de service, à organiser les débats sur les évolutions potentielles, non pour s’y opposer par facilité ou s’y rallier par néopathie, mais pour en définir les conditions optimisées de sa mise en œuvre. »
Comme le rappelle celui qui l’a bien connu jusqu’à la fin de sa vie, c’est au nom de ce pragmatisme qu’en 1985, face à un syndicat au bord de la faillite, Jean Jacquin a demandé à ses adhérents les plus puissants de doubler leur contribution pour sauver toute la structure. C’est à cette époque aussi que le nouveau président a remobilisé ses membres autour de trois axes définis notamment avec Claude Brian : « Grandir, se Lier et Agir pour la formation » (lire ci-contre). Un pragmatisme empreint de beaucoup de clairvoyance : en validant dès 1988 la mise en place d’une politique de récupération et de recyclage des fluides frigorigènes moyennant un surcoût, Jean Jacquin acceptait de signer une convention réunissant toutes les professions de la filière aux intérêts parfois divergents. Dépassant l’intérêt strict du seul métier d’installateur, il l’engageait alors dans une dynamique d’amélioration de son image et de ses pratiques grâce à des méthodes plus vertueuses (lutte contre les fuites et économie circulaire avant l’heure). Convaincu de la justesse d’une démarche inédite au plan mondial et dont la pertinence est aujourd’hui saluée internationalement, le président a cherché ensuite à en convaincre ses homologues européens. Ceux-là mêmes qu’il aura fédérés dès 1987 lors d’une première journée européenne des frigoristes, prémices de la création de l’AREA qu’il a ensuite présidée. Et faisant encore fi de l’entre-soi, Jean Jacquin a aussi eu un rôle moteur dans la création de l’AFCE priorisant avant tout la protection de l’environnement.
Ardent porte-parole d’une profession dont il défendait le savoir-faire spécifique, Jean Jacquin n’a eu de cesse d’exhorter les installateurs à valoriser leurs particularités auprès des clients et des jeunes en recherche de formation. Et Claude Brian de conclure : De cette conviction sans cesse martelée auprès de ces pairs, jean Jacquin a fait le combat de sa vie professionnelle dont on fait aujourd’hui mémoire.
Les beaux jours du club 90
Alors que l’inflation se faisait galopante au milieu des années 70, marquées alors par le premier choc pétrolier, Jean Jacquin et un certain nombre de collègues ont eu l’idée de créer le Club 90. L’objectif était de faire passer les règlements des factures fournisseurs de 30 à 90 jours fin de mois…
« Il a créé un syndicat moderne »
Jean-Luc Carré, actuel Président du Snefcca a rendu hommage à son « emblématique » prédécesseur, sur le site du syndicat.
En tant qu’entrepreneur, il fut toujours avant-gardiste grâce à une vision stratégique hors pair. Il a été par exemple un des premiers à abandonner le système des contrats de concession avec les fabricants pour sauvegarder l’indépendance de son entreprise à une époque où les installateurs de Froid structurés étaient intégrés dans ces réseaux de concession.

La Rpf
Tout au long de sa carrière il n’a eu de cesse de valoriser son entreprise et de la développer en quittant les sentiers battus des marchés hautement concurrentiels et en osant aborder des secteurs très spécifiques qu’il appelait des « niches » ou en développant le service et la maintenance, plus profitables.
Il ne manquait jamais une occasion de rappeler d’une part que la valeur ajoutée essentielle de l’installateur c’est sa compétence technique et d’autre part que la réglementation, très dense dans nos métiers notamment dans le domaine environnemental avec les fluides frigorigènes, constituait un atout commercial.
En tant qu’administrateur du syndicat dans un premier temps, il a contribué à l’accueil des installateurs de cuisine professionnelle en 1984, illustré par l’ajout d’un deuxième « C » au sigle Snefcca.
Élu à la présidence en janvier 1985, qu’il a quittée le 19 décembre 2007, Jean Jacquin a développé une politique syndicale basée sur trois piliers :
Grandir, en faisant du syndicat un organisme représentatif et donc influent (il a réussi par exemple l’unification du Snefcca et du Syndicat Général et National du Froid dans les années 90).
Se Lier, en favorisant des contacts avec de nombreux organismes, syndicats, associations susceptibles de renforcer l’action du Snefcca dans tous les domaines et toutes les activités (par exemple l’Association Française pour les Pompes à Chaleur).
Agir pour la Formation en travaillant à adapter les programmes aux évolutions techniques (mise en place du Bac Pro Froid en 3e CPC Métallurgie).
Grâce à son entregent de nombreuses actions ont été possibles telles que la création d’un collectif de huit professions, devenu « Association de défense des entreprises pénalisées par l’affiliation à une caisse de congés payés du bâtiment », ou le programme de « rafraîchissement des locaux de santé, des maisons de retraite et logements foyers » en partenariat avec le ministère de la Santé après la canicule de 2003.
Il a développé l’implication des structures régionales du syndicat dans son fonctionnement et les qualifications professionnelles Qualiclimafroid et Qualicuisines dont il avait compris l’importance.
Sous sa houlette le Snefcca est passé du stade de petit syndicat peu représentatif à un outil de lobbying et de prestations de services dédié aux entreprises d’installation, faisant tripler le nombre d’adhérents en quinze ans.
« Je lui dois un grand Merci »
Robert Pichot, ancien associé de Jean Jacquin, nous a adressé son témoignage.
Par un certain hasard, ou plus exactement grâce à une petite annonce de La Rpf et à des relations au syndicat, après une vie professionnelle à Paris, et souhaitant évoluer, j’ai rencontré Monsieur Jean Jacquin. Concessionnaire Satam à Châteauroux, il voulait alors créer une agence à Poitiers en 1971. Il a su me faire rapidement confiance et m’a laissé une grande liberté. L’entreprise a évolué et nous avions pris l’habitude de travailler avec beaucoup d’échanges et de discussion dans un grand respect mutuel. Nous étions probablement très complémentaires. Jean Jacquin m’a alors fait entrer au capital et s’en est suivi la création d’une agence à Bourges et une autre à Tours.

D.Eskenazi
Robert Pichot et Jean Jacquin à l'occasion de la remise de sa Légion d'honneur.
Nous avons développé l’entreprise et adapté son organisation pour toujours coller à l’évolution de notre métier. Notre collaboration a duré de 1971 jusqu’à l’année 2000, suite à la cession de la société à Axima. Durant toutes ces années, les problèmes, même les plus difficiles, ont été discutés afin de les régler ensemble et en toute confiance. Depuis la vente, nous sommes restés en parfaite relation et avions plaisir à nous rencontrer. Nous sommes restés très attachés à l’entreprise et à ses collaborateurs. Grâce à ses qualités humaines bien connues de la profession, je dois un grand merci à Jean Jacquin qui m’a permis cette vie professionnelle que je souhaite à beaucoup.
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